1er mai 2012

Les privilèges s’accroissent depuis 30 ans

Nous avons vu précédemment qu’un monde de privilèges séparait actuellement, en 2012, les salariés du public des salariés du privé.

Nous allons maintenant examiner comment ces privilèges ont évolué depuis une trentaine d’années. En signalant au passage que  «la  crise », n’a pas ralenti la saignée. Les changements intervenant dans une période de crise sont en effet particulièrement révélateurs de l’état d’une société. On peut y apprécier les efforts de « solidarité » : tous les candidats à la Présidentielle  appellent au rassemblement, à se serrer les coudes, ou la ceinture…

Eh bien, si vous allez directement en bas de page, vous apprendrez, si vous ne le saviez pas déjà, que le % d’agents du Public dans  la population française, s’accroit depuis plus de 30 ans. Leurs privilèges croissent et se multiplient. Vous pouvez certainement anticiper les conséquences sur la dépense publique et la ponction opérée par les Fonctionnaires sur les autres Français.

 

 

1 _ A quel rythme prolifèrent-ils ?

 

Le nombre des fonctionnaires « en activité », c’est-à-dire sans compter les retraités, croît de manière continue, à un rythme bien supérieur à celui de la population française, et à celui des salariés du privé : « de 3.864.960 agents en 1980, l’effectif des fonctions publiques françaises, État, territoriale (régions, départements, communes, intercommunalité…) et hospitalière est passée à 5.267.935 en 2007 » pendant que la population française passait  de 53,7 millions d’habitants à 63,5 millions « La part de l’emploi public dans l’emploi total passe de 17,8 % à 20,6 % ». (Source : article de MAUD BAZOCHE dans Le Cri du Contribuable numéro 81 de février 2010).

Autrement dit :

  • si le pourcentage de fonctionnaires dans la population était resté à son niveau de 1980, on aurait eu 4.570.000 fonctionnaires en 2007, au lieu de 5.267.935, soit 700.000 en moins (697.638 exactement).
  • ou encore, sauf erreur de calcul : sur 3.859.000 emplois créés, au total, entre 1980 et 2007, 1.403.000 l’ont été dans la FP, et 2.456.000 dans le Privé. C’est ce que l’on appelle « lutter contre le chômage », en France : comptabiliser et payer 700.000 personnes comme fonctionnaires plutôt que comme chômeurs, sans augmenter la production de biens et services marchands. Un fonctionnaire coûte au contribuable combien de plus qu’un chômeur ?

 

Pensez-vous réellement qu’il y ait des raisons valables à cette mise à l’abri, à la charge « des autres », de 700.000 Français de plus, pendant une période où la concurrence internationale s’intensifie ? Où il faudrait produire et exporter plus pour équilibrer notre balance commerciale ?

 

(NB : A signaler que nous n’avons que les chiffres des fonctionnaires « en activité », et répertoriés… Pour passer au total de la « population fonctionnaire », il faudrait ajouter les salariés du Public non fonctionnaires, et les retraités…et peut-être même des fonctionnaires « fantômes », sans « postes », mais avec paies. Comme le %  retraités/actifs  de la FP croît plus vite que dans le privé, la part de la population  fonctionnaire, dans la population totale croît encore plus vite que la part dans l’emploi total)

 

2_ Et comment ont évolué leurs chers /couteux privilèges ?

 

Notre but, ici, est seulement de constater comment ces privilèges ont évolué au niveau individuel : comment a évolué l’écart entre un salarié du public et un  salarié du privé.

2_1 : évolution des privilèges entre 1980 et 2012.

 

A_ l’écart de salaire s’est inversé :

Avertissement :  Il y a lieu d’être très prudent, quand on parle d’augmentations  des fonctionnaires, ou quand on entend une « information » sur le sujet. Il faut faire préciser de quoi on parle : en effet ces augmentations comportent plusieurs composantes : des révisions de grille par catégorie, des augmentations individuelles, des primes de performance (comme celle qui a permis, au 1er janvier 2012, d’augmenter de 25 % les salaires de 160 000 fonctionnaires). …D’autres augmentations résultent de la « garantie individuelle du pouvoir d’achat, créée en 2008, en pleine crise. A contrario, dans le secteur privé, quand on parle augmentation  de salaire à propos d’un individu, il s’agit de l’augmentation totale de son salaire. Quand on parle augmentations de salaires au sein d’une entreprise, il s’agit de l’augmentation de la masse salariale, en principe à effectifs constants. D’autre part un des soucis majeurs de l’administration et des syndicats , est d’éviter au maximum la production et la publication d’études comparatives de salaires Public/privé.

 

en 1980, le salaire moyen dans la fonction publique était inférieur au salaire moyen dans le privé. La « justification » généralement invoquée était que la relative faiblesse des salaires dans la FP était  compensée par la sécurité de l’emploi.

 

En 1983, à l’occasion du vote d’un nouveau statut de la fonction publique, à l’initiative du ministre communiste Anicet le Pors, la disposition suivante a été introduite par l’article 15 : « le gouvernement dépose tous les deux ans, en annexe au projet de loi de finances de l’année, un rapport sur les rémunérations et les pensions de retraite versée au cours des deux années précédentes à l’ensemble des fonctionnaires… ». Ce rapport a donc été publié tous les deux ans à partir de données collectées par l’INSEE. Il a montré que, année après année, les salaires réels de la fonction publique augmentaient d’environ 1,3 % par an plus vite que ceux du privé. En 1994, ils les ont dépassés. Et depuis, l’écart continu de se creuser. Il était impossible pour les syndicats de prendre  le risque de laisser connaître cette dérive. Le jour de Noël 2007, ils ont donc fait abroger l’article 15 de la loi le Pors.

 

( NDLR : Vive l’omerta. As-tu oublié, cher lecteur, que les leaders des syndicats du Public sont les mêmes que ceux du Privé ? Mais il faut être réaliste quand veut être leader syndical : Pour augmenter les salaires des adhérents du Public, il est plus facile de piocher discrètement dans la poche des adhérents-contribuables du Privé, que dans celle des patrons. Enfin, voilà un « acquis social » qui continue à prospérer. C’est le principal.

Mais à propos : la loi du 25 décembre 2007 est une LOI. Donc un texte voté par les députés et sénateurs. Se pourrait-il que ces élus soient complices de l’omerta ? Nous préférons penser qu’ils ont voté sans réfléchir, parce qu’ils n’avaient jamais noté le contenu, ni même l’existence de cette annexe au projet de loi de finance. Ou qu’ils ont jugé convenable, de faire un petit cadeau de Noël à leurs  électeurs et anciens collègues fonctionnaires, en leur garantissant que  l’on ne prendrait plus le risque de voir divulgué l’irrésistible ascension de leurs salaires. On n’oublie pas d’où l’on vient, on a toujours l’esprit de famille)

 

Cependant l’INSEE continue de collecter des données, et publie chaque année un « portrait social de la France » dans lequel on trouve une comparaison des salaires public/privéemoins détaillée que ce qui se faisait auparavant dans l’annexe au projet de loi de finances. On y constate cependant qu’en 2008 le salaire annuel net moyen des agents de l’État (n’oubliez pas qu’il existe aussi des agents territoriaux, et des agents hospitaliers) était de 15 à 17 % supérieurs à celui du privé. Pendant la crise, entre 2007 et 2012 l’augmentation moyenne des salaires des fonctionnaires d’État a été supérieure à 3,7 % par an. En 2009 2010 l’écart public privé, s’est accéléré, passant à environ 2 % par an. À fin 2010, on peut donc estimer que l’écart public (AFP d’État)/ privé est l’ordre de 20 % en moyenne. Pas mal : depuis 1980, on a dû passer de – 10% à + 20% .Signalons que, toujours pendant la crise, un décret du 29 février 2008 a augmenté  les rémunérations des enseignants.

 

De dangereux trublions de l’ordre établi ont fait des estimations des économies de dépenses publiques que l’on obtiendrait si on diminuait les salaires publics, comme cela a été fait récemment chez les Grecs(15 %) , et les Espagnols (5 %). Appliquée aux agents des trois fonctions publiques, et aux retraités, une baisse de 5 % donnerait une économie de l’ordre de 24 milliards d’euros par an. Et 72 milliards d’euros par an pour une baisse de 15 %.

 

De plus, Il faut bien comprendre  que l’évolution du salaire moyen ne reflète pas la réalité au niveau d’un individu, et surtout sur longue période. Compte tenu des « incidents du parcours professionnel » l’augmentation de salaire individuelle d’un salarié du privé- mesurée comme le rapport  entre son salaire en 2011, et le salaire de sa première année de travail –  a de fortes chances d’être inférieur à l’augmentation du salaire moyen du privé entre ces mêmes dates. Il faut toujours commenter avec circonspection, les résultats de comparaisons  sur l’évolution de moyennes. En particulier quand, comme c’est le cas ici, l’une des moyennes porte sur des salaires augmentant tous linéairement avec le temps (les salaires de la FP), alors que l’autre moyenne porte sur des salaires dont une grande proportion évolue de manière « chaotique », avec des hauts et des bas,  et des « dépressions » en période de chômage par exemple.

 

Autre mode de comparaison possible pour comparer des évolutions de salaire : on considère un salarié du privé, et un fonctionnaire, qui ont commencé leurs vies professionnelles avec le même salaire So, au cours de l’année No. Puis on compare  les cumuls des augmentations de salaires (portions des salaires annuels, y compris indemnités de chômage éventuellement, au-delà de So) perçus  par chacun d’eux au cours des n années écoulées de No à 2011. Pour passer aux % d’augmentations, il suffit de diviser chacun de ces cumuls par n*So.

 

Un cas type à examiner,  une comparaison simple à faire : on considère un salarié du privé qui a commencé sa carrière en 1980 en percevant le SMIC ; on suppose ensuite qu’il a eu la chance de conserver son emploi en permanence, jusqu’en 2011, mais en restant rémunéré au SMIC (de tels cas existent certainement ; ce cas illustre bien, de toute façon, ce que peut faire, au mieux la société française, pour ses travailleurs du privé les plus mal payés). On compare l’évolution du salaire de ce smicard avec celle du fonctionnaire – réel, pas virtuel- le plus mal payé en 1980, et dont l’évolution de carrière a été la plus médiocre.

 

B_ Garantie de l’emploi maintenue, contre précarité croissante.

 

La garantie de l’emploi existait en 1980 ; elle existe toujours en 2012 ; il serait intéressant de connaître le nombre de fonctionnaires licenciésentre ces deux dates, non  pas « suspendus », mais réellement privés  de salaire ou de mise à la retraite anticipée…( n’y en a-t-il pas parmi eux qui auraient fait une petite erreur en envoyant une dizaine d’innocents en prison ? Que sont-ils devenus ?)

Par contre, pour les salariés du privé, trouver et conserver un emploi est devenu de plus en plus difficile entre 1980 et 2011. Pour les jeunes, la moyenne d’âge d’obtention du premier contrat de travail (pas d’un stage) a augmenté ; Ils galèrent  de plus en plus pour trouver un véritable premier emploi. Parmi  les seniors la proportion des chômeurs a fortement augmenté depuis 1980. Enfin, quelle est la proportion de salariés du privé entrés  sur le marché du travail depuis 1980, et qui n’ont pas connu une ou plusieurs périodes de chômage ?

 

C_ Les retraites :

le ratio d’inégalité calculé selon la méthode Newton a fortement augmenté. Le calcul n’a pas été fait pour 1980, mais son résultat est évident : le principe de base de fixation de la pension du public n’a pas changé : 75 % de la moyenne des derniers  salaires. Par contre les retraites du privé ont diminué : en proportion des salaires accumulés pendant toute sa vie professionnelle, un salarié du privé percevait en 1980 une pension bien supérieures à celle qu’il perçoit en 2011. Le ratio d’inégalité  public-privé a sans aucun doute fortement augmenté entre 1980 et 2011.

 

D_Les  privilèges de retraite non pris en compte dans le calcul du ratio

d’inégalité ont été également augmentés entre 1980 et 2012.

 

E_ L’absentéisme « reconnu, enregistré »  augmente

dans la fonction publique: par rapport aux salariés du privé, le fonctionnaire travaille toujours de moins en moins pour gagner toujours plus. Le je m’en foutisme a même atteint dans certaines collectivités des sommets insultants pour qui veut bien les constater (voir le « désopilant » livre « absolument débordée » de Zoé Shepard, employée du Conseil régional d’Aquitaine: Certains fonctionnaires locaux travaillent réellement moins de 35 h par mois).

 

F_ Accès au logement :

un salarié du privé qui gagne autant qu’un fonctionnaire n’a aucune chance de se voir attribuer un logement social, alors que les fonctionnaires et autres agents du public continuent  à occuper des logements auxquels ils n’auraient pas droit si les logements sociaux étaient attribués sur le seul critère du plafond de ressources.

 

G_  la proportion de fonctionnaires  parmi les élus a fortement augmenté depuis 1980

. Jusqu’à cette date il n’y avait jamais eu de majorité de fonctionnaires à l’assemblée nationale. La rémunération des élus a elle aussi augmenté depuis 1980, encore  plus que celle des  fonctionnaires non élus, et évidemment beaucoup plus que le salaire moyen du privé. Enfin, les élus  se sont créé des privilèges nouveaux, qui n’existaient pas en 1980.

 

 

2_2 : Pas de trêve pendant la crise : la saignée  se poursuit.

La crise : pourquoi ? Pour qui ?

La crise a bon dos : elle est responsable de tout , et chaque Français se considère comme une victime de la crise.

Essayons d’y voir un peu clair : quelles sont les causes de « la crise » ? Qui en sont les principales victimes ?

Tout le monde semble bien d’accord pour considérer que, au moins pour les pays européens, il y a eu deux périodes dans la « crise financière », ou deux crises successives : la crise des Subprimes, et la crise du surendettement des états ou « de la dette ».

 

On fait habituellement démarrer la crise des Subprimes au 15 septembre 2008, date de la faillite officielle de la banque d’investissement multinationale Lehman Brothers. Cette crise a effectivement fait de nombreuses victimes dans les établissements financiers du monde occidental. Il n’est pas certain qu’elle soit complètement terminée.

 

La deuxième période de la crise financière commence en  2010, lorsque les agences de notation (dont les brillants analystes n’avaient pas anticipé la crise des subprimes…) attirent l’attention des prêteurs internationaux sur le niveau d’endettement de certains Etats. Cette crise n’est à coup sûr pas terminée : personne ne peut prédire si et quand elle va s’arrêter, en Europe en particulier.

 

On peut raisonnablement dire que la crise des Subprimes est née aux États-Unis, et s’est propagée à tous les établissements financiers de la planète. Ceux-ci se sont montrés incapables d’apprécier correctement les risques découlant d’une overdose de crédits  immobiliers  à une population incapable de les rembourser, et des pièges de la « titrisation », qui a permis de diffuser le « virus ». En résumé, tous les établissements financiers ont démontré leur incompétence à apprécier des « risques de crédit », ce qui devrait pourtant être leur raison d’exister, leur « cœur de métier ». Les victimes de l’écroulement du  château de cartes ont été les établissements financiers les plus incompétents, puis des entreprises frappées par la raréfaction du crédit, et pour finir bien évidemment les salariés de ces établissements financiers et de ces entreprises. Tous des salariés du privé.

 

Les responsables de la crise du surendettement des états sont bien évidemment les gouvernements de ces états, qui n’ont tout simplement pas su gérer leurs finances. On pourrait cependant penser que c’est leur premier devoir, avant que de nous expliquer quel avenir radieux ils nous préparent, si nous les élisons. Ils ont préféré emprunter sans limite plutôt que d’équilibrer leur budget, c’est-à-dire d’équilibrer chaque année les recettes (les impôts et autres prélèvements de toute nature) et les dépenses publiques.

Certains pays s’étaient préoccupés, et avaient même réussi, à équilibrer leurs budgets  et à stopper leur endettement bien avant la crise. Pas la France. D’autres pays, dès la naissance de la crise de la dette, ont pris des mesures pour réduire drastiquement leurs dépenses publiques, et en particulier le nombre et le train de vie de leurs fonctionnaires. Pas la France. Pourtant, pour ne  considérer que l’Europe, les causes de la crise de la dette sont différentes selon les pays : tricherie sur l’état des finances publiques, corruption généralisée, fraude fiscale généralisée, en Grèce par exemple ; éclatement d’une bulle immobilière un peu analogue à celle des Subprimes, en Espagne. La France, là encore brille par son « exception » : la principale cause de son surendettement, et de son accélération, est le poids croissant des salaires et pensions du secteur public. Nous sommes là encore les champions du monde. Et pourtant, aucune vraie mesure, à l’échelle du problème, n’a été prise à ce jour (avril 2012), ni ne figure dans le programme d’aucun candidat à la présidentielle. Malgré la déferlante du chômage, nos élus locaux, responsables des embauches des FP territoriale et hospitalière, n’ont pas cessé de gonfler leurs effectifs.

 

Est-il besoin d’être un « expert en économie » pour constater que, pendant les deux périodes de la crise, les Français (personnes physiques, électeurs) qui en ont le plus pâti sont, d’une part les salariés du privé, précipités dans le chômage , et ceux qui avaient placé (« investi ») leurs économies en bourse, ou même en assurance vie, d’autre part. Les premiers  sont certainement beaucoup plus à plaindre que les premiers, ne pensez vous pas ?

Les salariés du public, quant à eux, traversent  la crise sans en ressentir les effets, alors qu’ils en sont les responsables. Ils ont même profité de cette période pour croître en nombre, continuer à faire grève, et augmenter leurs privilèges, ou même en inventer de nouveaux.

 

Conclusion : Le % d’agents du Public dans  la population française, s’accroit depuis plus de 30 ans. Leurs privilèges croissent et se multiplient. Vous pouvez certainement anticiper les conséquences sur la dépense publique et la ponction opérée par les Fonctionnaires sur les autres Français.